lundi 31 mai 2010

Welcome to South Africa 2010 (28) : Prière amener ses ballons


Il est (parfaitement) rond, il sera au centre du jeu durant toute la Coupe du monde de football en Afrique du Sud, et il déclenche déjà une vive polémique ? Le nouveau ballon de la Fifa, bien sûr. Dénommé « Jabulani », il fait l’objet de très sévères critiques de la part des joueurs.
« Des caractéristiques épouvantables ». C’est en ces termes sans concession que le gardien espagnol du Real de Madrid Iker Casillas, capitaine de la sélection championne d'Europe et favorite pour le Mondial, a décrit dimanche 30 mai le modèle de ballon qui doit sévir sur les pelouses sud-africaines. « C'est un peu comme un ballon de plage », a-t-il ajouté ironiquement, au lendemain d’un match amical contre l’Arabie saoudite.
Selon Casillas, plusieurs joueurs se sont également plaints du ballon officiel, estimant qu’il s’agissait d’un « élément fondamental » qui risquait de gêner la compétition. Son partenaire, le Barcelonais Xavi, a souligné pour sa part : « La question c'est de s'y habituer, mais la vérité, c'est qu'il bouge beaucoup… »
« Terrible, horrible », un vrai « désastre » !
Le modèle « Jabulani » (« fêter » en zoulou) a été conçu tout spécialement pour le Mondial 2010 par l’équipementier Adidas. Mais il est loin d’emporter l’adhésion des joueurs, qui jugent ses trajectoires trop flottantes. L'Italien Gianluigi Buffon, notamment, s'est joint au concert de critiques. « Le nouveau modèle est complètement inadapté et je trouve honteux de jouer une compétition si importante, à laquelle tant de champions participent, avec un ballon comme ça », a-t-il écrit sur sa page Internet officielle.
Le gardien brésilien Julio Cesar a quant à lui jugé le ballon « terrible, horrible », et l'a comparé à un ballon de supermarché. Son homologue français, Hugo Lloris n’y a pas été non plus par quatre chemins en parlant de « catastrophe ». Comme ses collègues, il dénonce les trajectoires imprévisibles du « Jabulani ».
Parfaitement rond et sans coutures
Les attaquants ne sont pas en reste, comme l’Italien Giampaolo Pazzini, qui craint un « désastre » - tant pour les gardiens que pour les attaquants - en raison de la légèreté du ballon.
Reste qu’il est d’usage que les nouveaux ballons, souvent porteurs d’une technicité innovante, soient très critiqués lors de leur sortie sur le marché. Lorsqu'il a été dévoilé par la Fédération internationale de football association (Fifa), le « Jabulani » a été décrit comme le premier ballon parfaitement rond, puisqu'il est moulé et non cousu, soit le plus précis jamais mis au point.

AFP 31 mai 2010

dimanche 30 mai 2010

Boulevard des clichés

Lu dans Jeune Afrique Spécial Mondial 2010 :"Si les joueurs africains, affirme le président de la Fifa Joseph S. Blatter, connaissent déjà leur valeur individuelle, ils doivent aussi prendre conscience de leur valeur réelle sur le plan collectif. (...) Cette prise de conscience devrait conduire les équipes africaines plus loin que les autres. Car elles ont en effet de super footballeurs, époustouflants physiquement et techniquement. Ils ont tout ....sauf cette conscience collective (l'émotion est nègre, la raison est blanche, n'est-ce pas?). Il faut un chef pour cela. L'entraîneur national est naturellement l'homme clé, mais comme il faut aussi une continuité dans le jeu et dans la tactique des équipes nationales, il doit respecter la culture du pays (ndlr : avec des joueurs qui sont tous expatriés?). Chaque pays doit préserver l'identité de son football. (...) Par ailleurs, on n'obtient pas des résultats en changeant continuellement les directeurs techniques nationaux, les coaches et les managers. (...)Vous savez, les trois C dans le domine militaire sont également valables dans la vie : commander, contrôler, corriger..."
Gageons que si Sepp Blatter était libre de tout engagement, Jacques Anouma, le patron de la Fédération ivoirienne de football, n'aurait pas hésité à l'engager pour commander, contrôler et corriger les Eléphants....

mercredi 26 mai 2010

Welcome to South Africa 2010 (27) : au karcher

Alors que le pays s’apprête à accueillir la Coupe du monde de football, les populations indésirables - mendiants, prostituées, enfants des rues - sont victimes d’une politique d’aseptisation menée tambour battant par Pretoria.
Comme nombre de pays accueillant un sommet ou un événement important qui attire sur eux les regards du monde entier, l’Afrique du Sud est devenue une fervente adepte des « cache-misère ». Quelques semaines avant le début de la Coupe du monde de football, qui aura lieu du 11 juin au 11 juillet prochain, le pays de Mandela a donc commencé son grand nettoyage d’automne (et non de printemps, puisque nous sommes dans l’hémisphère Sud).
Adieu, donc, mendiants, prostituées et enfants des rues qui, auparavant, pouvaient vaquer tranquillement à leurs occupations aux abords des places et des carrefours des principales rues du pays. Il n’est pas question d’importuner les quelque 300 000 touristes attendus, soit 150 000 de moins que prévu initialement - la plupart étant blancs et européens, bien sûr. Les populations indésirables sont donc éloignées des lieux les plus fréquentés par les autorités, au grand dam des associations citoyennes que ces pratiques révoltent.
« Les gens sont retirés de la rue et envoyés dans des refuges, mais ce sont des camps de concentration », s’indigne Warren Whitfield de l'Addiction Action Campaign, une organisation spécialisée dans l'aide aux toxicomanes. « C'est une violation de notre droit constitutionnel », ajoute-t-il, accusant son pays d'attenter « aux droits de l'homme pour préparer cet événement mondial ».
À Durban, sur la côte Sud-Est, où aura lieu une demi-finale, le front de mer est inhabituellement calme. Depuis la rénovation de la promenade - pour environ 20 millions d'euros -, les sans abris et vendeurs à la sauvette ont disparu. Quant aux 400 enfants qui survivent d'ordinaire dans les rues de la ville, ils auraient été emmenés par la police, selon les associations, dans un foyer en périphérie. « Ils nous ont dit de retourner d'où nous venons. Ils disent que Durban est sale à cause de nous », a témoigné un jeune de 13 ans au journal The Times.
Les migrants zimbabwéens, déjà victimes de violences xénophobes en mai 2008 qui ont fait 62 morts et des milliers de déplacés, font aussi les frais du grand coup de balai décidé par Pretoria. Selon un rapport publié le 26 mars par Solidarity Peace Trust, une association de défense des droits de l’homme, Johannesburg est notamment l’objet d’une « politique claire d'aseptisation », en particulier autour de la zone autour d'Ellis Park, l'un des dix stades du Mondial.
Au cours des deux derniers mois, la ville s’est vidée de ses aveugles zimbabwéens, mais aussi des mères avec enfant qui mendiaient aux principales intersections de la ville. « Leur présence viole les règlements municipaux et nous les arrêtons (...) C'est un exercice de police classique, que nous avons intensifié en vue du Mondial », reconnaît Edna Mamonyane, porte-parole de la police municipale. « Dans la plupart des cas, les femmes avec enfants ou les handicapés sont envoyés dans des centres sociaux, ajoute-t-elle. Seules les prostituées nous donnent vraiment du fil à retordre. Nous les arrêtons chaque jour de nouveau. »
La prostitution est illégale en Afrique du Sud. Pour des raisons de santé publique, plusieurs groupes de pression plaident donc pour sa décriminalisation pendant le Mondial. Mais devant l'opposition farouche d'associations familiales et religieuses, les autorités ont opté pour une approche à la dure. Dès septembre, la ville du Cap a ainsi mis en place une « Brigade du vice ».
Des dispositions qui n'empêcheront pas les femmes vénales d'offrir leurs services aux fans de foot, souligne la Cellule d'action pour l'éducation et la défense des travailleurs sexuels (Sweat), basée au Cap. « Nous pensons plutôt voir une augmentation de l'activité des travailleurs sexuels pendant la Coupe du monde », relève l'organisation. « C'est effrayant quand on sait que notre pays a le plus grand nombre de séropositifs au monde. » Quelque 5,7 des 48 millions de Sud-Africains sont porteurs du virus du sida. Le taux de prévalence du VIH est de plus de 45 % chez les prostituées, selon la seule étude sur le sujet publiée en 1998.

AFP 25 mai 2010

jeudi 20 mai 2010

Welcome to South Africa 2010 (26) : le lamido "disjoncte"

L’élection de Joseph Blatter à la présidence de la Fifa en 1998 avait, rappelons-le, déstabilisé Issa Hayatou qui avait affiché un soutien sans faille au Suédois Lennart Johansson. Elle avait démontré que le président de la CAF ne pouvait pas prétendre contrôler les suffrages des 52 associations nationales africaines. Ses mots d’ordre qui n’avaient pas été suivis, ne le seront pas non plus en 2002 quand il se présenta contre Blatter.
Si en ces deux occasions, l’Afrique du Sud n’avait pas mené de fronde anti -Hayatou, elle ne s’était pas ralliée à lui. D’où la méfiance grandissante de notre l'amnios du ballon à l’encontre des décideurs du football sud-africain.
Certes, le 6 juillet 2000, à Zurich, Hayatou jouera la carte de l’Afrique du Sud, alors candidate à l’organisation de la Coupe du monde 2006. Mais, quatre ans plus tard, il changera son fusil d’épaule. Il n’exprimera pas de choix public pour le Mondial 2010 - réservé par la Fifa, à un pays africain. Mais à quelques jours du vote décisif, les promoteurs de la candidature du Maroc affirmaient, sans être contredits, que le soutien des quatre membres africains du comité exécutif de la Fifa ( à savoir, outre Issa Hayatou, le Malien Amadou Diakité, le Tunisien Slim Aloulou et le Botswanais Ismaël Bhamjee) et celui des Européens ( Michel Platini, Michel D’Hooghe, Angel Maria Villar Llona et Senes Erzik) leur était acquis.
Le 15 mai 2004, en présence de trois prix Nobel de la paix (Nelson Mandela, Frederik de Klerk et Desmond Tutu) et du président Thabo Mbeki, le verdict tombe : 14 voix pour l’Afrique du Sud (soutenue par Blatter) et 10 pour le Maroc. Juste après l’annonce de la victoire sud-africaine, Hayatou, Aloulou, Diakité et Bhamjee quittèrent la salle de conférence du World Trade Center de Zurich sans avoir félicité Nelson Mandela et Thabo Mbeki.
Trois années après, la Fifa organisa le 18 juillet 2007, au Cap, un match de gala à l’occasion du 90è anniversaire de Nelson Mandela. En présence du roi Pelé et d’une multitude de personnalités sportives et politiques, une sélection d’Afrique affronta son homologue d’Europe. Invité à la manifestation, Issa Hayatou ne se déplaça parce que « retenu par le tournoi de football des Jeux africains d’Alger » !
Le 28 avril 2010, Hayatou est invité à Pretoria par le président sud-africain Jacob Zuma qui lui a décerné, ainsi qu’à Joseph Blatter, l’Ordre de Grand Compagnon d’Oliver Tambo, une distinction attribuée à des dignitaires étrangers amis de l’Afrique du Sud. Après la cérémonie de remise, Hayatou dut se soumettre aux questions des médias. Et ceux-ci l’interpellèrent sans ménagement sur son soutien au Maroc en 2004.
Hayatou vit rouge et il piqua sa colère : « C’était un vote à bulletin secret. Vous ne pouvez savoir si j’ai voté ou non pour l’Afrique du Sud ! » Apostrophant le journaliste trop curieux, il lui lança : « Vous avez presque l’âge de mon fils. Vous ne pouvez m’attaquer comme çà ! » Une réponse qui, pour le moins surprit, l’assistance.
Nommé par Blatter à la tête de la commission d’organisation de la Coupe du monde 2010, Hayatou sera de nouveau confronté à la curiosité de la presse sud-africaine.

Welcome to South Africa 2010 (25) : out of Africa

Le ministre du Tourisme sud africain, Marthinus van Schalkwyk, a revu à la baisse le mardi 18 mai 2010, le nombre de visiteurs attendus lors de la Coupe du monde qu'abrite son pays. Il table maintenant sur 300 000 visiteurs, soit 150 000 de moins que les prévisions initiales.
La Fédération internationale de football (Fifa) a, pour l'instant, vendu plus de 2,5 millions de billets, dont 38% à des étrangers, sur un total de trois millions. «Seulement 2% de ces billets vont à des Africains, soit 11. 300 tickets», a regretté le ministre. Les prévisions départ escomptaient 48. 000 étrangers africains.
Le prix des billets des matchs du mondial est trop élevé et pas toujours à la portée de milliers d'Africains, a reconnu Marthinus Van Schalkwyk. Les billets de ce premier Mondial sur le continent (11 juin - 11 juillet 2010) ont été mis en vente via une procédure complexe sur internet. Les ventes n'ont véritablement décollé en Afrique du Sud qu'après l'ouverture de guichets spéciaux à la mi-avril.
Les billets les moins chers (14 euros, environ 9 000 F CFA) sont réservés aux Sud-africains. Les Africains doivent débourser au moins 80 dollars pour un match de qualification.
Joël Zoundi Fasozine, 19 mai 2010.

mercredi 19 mai 2010

Welcome to South Africa 2010 (24) : clientélisme, népotisme, du déjà vu

Les convoitises suscitées par les marchés géants du Mondial 2010 en Afrique du Sud ont donné lieu à une seule grosse affaire de corruption connue mais les soupçons de clientélisme, fléau croissant dans le pays, abondent.
Les "méga -événements" présentent toujours le risque de "pots-de-vin, fraudes et extorsion", écrit l'Institut pour les études de sécurité (ISS) dans un livre intitulé "Joueurs et arbitre: conflits d'intérêt et Mondial-2010".
En Afrique du Sud, ce danger semble s'être concrétisé lors de la construction du stade de Nelspruit (est) pour un milliard de rands (100 millions d'euros).
Le président du conseil d'agglomération, Jimmy Mohlala, avait dénoncé des malversations lors de l'octroi du marché aux entreprises sud-africaine Basil Read et française Bouygues Travaux Publics. Un rapport indépendant a étayé ses propos et, en février 2009, les autorités provinciales limogeaient l'équipe municipale.
Un an plus tard, Jimmy Mohlala était abattu à son domicile par deux hommes armés et cagoulés. Une enquête de police a été ouverte.
Aussi gênant soit-il, ce dossier reste isolé. L'Afrique du Sud a dépensé près de deux milliards d'euros pour accueillir la grand messe sportive, mais peu d'enquêtes ont été ouvertes et elles concernent surtout des petits marchés, comme celui d'un stade d'entraînement à Mthatha.
"Les programmes d'infrastructures de la Coupe du monde ont été plutôt propres dans la majorité des cas", estime Anthony Butler, professeur de Sciences politiques à l'Université de Witwatersrand à Johannesburg.
Selon lui, la fête du ballon rond a plutôt illustré les problèmes de clientélisme qui, sans être illégaux, pourrissent le climat des affaires en Afrique du Sud.
"Il semble y avoir une croissance importante du népotisme autour des marchés publics. A tous les niveaux de gouvernement, les contrats semblent être déterminés par les relations politiques, personnelles, familiales. . . plutôt que par une compétition ouverte", dit-il .
C'est également la préoccupation de l'ISS, qui cite le stade de Durban (sud-est) d'un coût de 3,1 milliards de rands (environ 300 millions d’euros). "Bien qu'il n'y ait aucune preuve de corruption, la construction du nouveau stade a bénéficié de manière extrêmement concentrée à de grandes entreprises du BTP (. . . ) et à l'élite politique locale", selon l'Institut.
En Afrique du Sud, plus de 50. 000 fonctionnaires sont également dirigeants d'entreprises et en 2006, plus de 600 millions de rands de marchés publics (60 millions d’euros) leur sont revenus (ou à leurs époux), selon un rapport officiel.
Le Congrès national africain (ANC, au pouvoir) promet régulièrement de s'attaquer à ces tenderpreneurs, un terme justement inventé en Afrique du Sud pour désigner ces hommes d'affaires qui bâtissent des fortunes en emportant des appels d'offres grâce à leurs réseaux politiques.
A cause d'eux, le pays ne cesse de reculer dans l'index de Transparency international sur la corruption ressentie par les milieux d'affaires. L'Afrique du Sud, classée 34e sur 180 en 2000, est tombée au 55e rang en 2009.
Face à cette collusion, "de nombreux leaders de l'ANC sont horrifiés. Mais en même temps, un grand nombre d'entre eux sont eux-mêmes compromis", souligne Anthony Butler.
A commencer par le président Jacob Zuma. Depuis son arrivée au pouvoir il y a un an, il ne cesse de prôner la fermeté contre les hommes politiques véreux. Mais, quelques semaines avant son sacre électoral, il était encore inculpé pour corruption. La justice avait abandonné les poursuites in extremis pour vice de forme.
AFP, 19 mai 2010

dimanche 16 mai 2010

Signé Francis Ford Coppola

Le dénouement de l'affaire Togo-CAF autorise à faire des constats :


* En dépit de ses rodomontades et ses cris d'orfraie, le maoudo (chef en langue peul) Issa Hayatou, président (à vie?) de la CAF a bel et bien opéré une retraite en rase campagne. il a annulé une sanction qui constituait un déni de justice et un monument de bêtise humaine

* Sa majesté Hayatou a rejeté toute offre de méditation africaine dans cette affaire. Il a fait preuve de morgue et opposé une fin de non recevoir, entre autres, au Président du Ghana et à l'Union africaine.

* Il a accepté de se soumettre à l'arbitrage du président de la Fifa qui a magnifiquement joué le rôle du parrain.

* L'épilogue conforte le pouvoir et l'omnipotence de Joseph Blatter. Il règne sur la Fifa et occupe le terrain en Afrique où, affirme-t-il, il "travaille la main dans la main avec la CAF" (un bel euphémisme). Il est concerné par tout ce qui se passe dans le continent : le social, la santé, le culturel, l'économique et dans le domaine du ballon, il ne se prive pas de faire des incursions dans le domaine technique. Il est in-con-tour-nable. Tant pis pour les gesticulations du maoudo!

jeudi 13 mai 2010

Welcome to South Africa 2010 (23) : Life, Above All!

" Il n'existe pas d'identité sud-africaine" affirme le cinéaste Oliver Schmitz (28 ans) qui avait en 1988, alors que l'apartheid était encore en vigueur, Mapantsula, un film dur et violent qui regardait la réalité sud-africaine en face. Réalisateur et scénariste, il présente au festival de Cannes 2010 Life, Above All (La Vie, par- dessus tout).
" Je crois que mon film, déclare Schmitz, Life, Above All, sera mis sur le boisseau en Afrique du Sud, pendant la Coupe du monde, parce qu'il n'est pas conforme à l'image mondiale que le pays essaie de créer pour favoriser les affaires et le tourisme. (...) Je crois que la liberté artistique ne compte pas parmi les priorités du gouvernement sud-africain, en ce moment. Elle ne semble pas non plus tenir une grande place dans la conscience collective. Il faut donner aux touristes ce qu'ils attendent, même s'il faut recourir aux stéréotypes culturels. L'"autre" Afrique du Sud devra attendre la fin de la partie, à moins que quelqu'un fasse justement un film à ce sujet. Mais il ne trouverait pas de financement en Afrique du Sud. (...) Malgré ce que je viens de dire, je ne suis pas pessimiste et je crois à "l'âme sud-africaine"*
* Le Monde Magazine, du 7 mai 2010

Vive la culture du "deal"!

Comme nous l'avions prévu, la réunion de conciliation CAF - Fédération togolaise de football (FTF), organisée le 7 mai au siège de la FIFA à Zurich par le maître des lieux s'est achevé sur un "efface tout et on recommence à zéro".
Curieusement, la FTF a reconnu qu'elle n'avait pas communiqué à la CAF son retrait de la Coupe des nations, Angola 2010 alors que son président -désigné en décembre dernier par la FIFA - n'est autre que le général Seyi Mémène, 1er vice-président de la ...CAF. Plus, elle a admis que les sanctions prises le 30 janvier par le comité exécutif de la CAF (suspension de 4 ans de la CAN et 50 000 dollars d'amende) avaient été conformes au règlement de la compétition! On croit rêver devant ce mea culpa qui tord le cou à la vérité, à l'éthique et à la dignité.
"Magnanime", sa majesté Hayatou VI accepta de demander à son comité exécutif - une belle assemblée de béni oui-oui - de lever les sanctions. Un mois auparavant, le président de la CAF avait évoqué l'affaire du Togo à sa manière associant la morgue à un aplomb à la limite de la décence. Et à maintes reprises, il avait pris prétexte d'une "ingérence politique du gouvernement togolais" pour justifier la sentence du 3O janvier. Finalement, la médiation de son ami Blatter lui aura permis de sauver la face.
Conclusion : il faut bien admettre que la culture du "deal" est bien enracinée dans toutes les institutions sportives internationales. Cette culture promeut le marchandage dans le périmètre défini par ces mêmes institutions.

dimanche 2 mai 2010

CAF - Togo : on efface tout?

Le 7 avril à Zurich, le président de la FIFA, Joseph S. Blatter promettait de régler le différent disciplinaire entre le Togo et la CAF avant la fin du mois d'avril grâce à une "méditation qu'il s'est proposé d'engager personnellement au sein du Tribunal arbitral du sport (TAS)". En fait, la réunion entre le médiateur et les deux parties se déroulera le 7 mai.

On se souvient que, suite à l'attaque dont elle a été victime le 8 janvier dans la province de Cabinda, l'équipe nationale togolaise s'était retirée de la Coupe d'Afrique des nations 2010 et le Comité exécutif de la CAF l'avait, le 29 janvier, exclue des deux prochaines éditions de la CAN et lui avait infligé une amende de
50 000 dollars US.

En date du 8 février, la Fédération togolaise (que préside par intérim et jusq'en juillet, le général Seyi Mémène, 1er vice-président de la...CAF!) a deposé un appel auprès du TAS pour demander l'annulation de la sanction et l'Etat togolais avait porté plainte à Paris contre les Forces de Libération de l'Etat du Cabinda/Position militaire (Flec/MP) mais aussi contre la CAF et son président, Issa Hayatou.
Il est évident que, depuis cette date, Hayatou ne s'est pas privé de mettre en avant un "marché" et d'exercer une pression sur les autorités sportives et politiques du Togo : vous retirez votre appel auprès du TAS et votre plainte déposée à Paris, et nous annulons les sanctions; vous les maintenez et nous les confirmons. Il a, par ailleurs, refusé toute médiation africaine dont celle du président du Ghana.

Le médiateur Blatter proposera vraisemblablement aux deux parties de "tout effacer et de se réconcilier". Ne dit-on pas de lui : "Blatter arrive à une table autour de laquelle sont assises dix personnes qui se détestent. Au bout d'une heure, elles sont amies, amies." ?

samedi 1 mai 2010

Welcome to South Africa 2010 (22) : Alexandra on my mind...

A lire et à méditer l’excellent reportage de Laurent Rigoulet dans l’hebdomadaire Télérama, daté du 1er mai 2010 et intitulé « Dans l’ombre de Johannesburg ».
Extraits : « Le ghetto d’Alexandra, « ville ténèbres » aux portes de la plus grande métropole d’Afrique du Sud, abrite une multitude de laissés-pour-compte. Le supporter de la Coupe du monde ne les verra sans doute pas …
(…) Un habitant d’Alexandra nous persuade de pousser jusqu’à la « frontière ». Au pied de la colline sur laquelle est perché ce ghetto noir, le plus vieux township de Johannesburg, les rues s’évasent, le silence s’étend, les rares passants sont noyés dans un morne décor. Une suite d’entrepôts décatis, un no man’s land d’industries en sommeil marque la séparation avec le riche quartier de Sandton, dont les tours scintillent au loin. Aux portes de la plus grande ville d’Afrique du Sud, la géographie de l’apartheid, qui créait des tampons en bordure des secteurs résidentiels n’a pas bougé.
(…)Sur les 500 hectares de maisonnettes et de bidonvilles d’Alexandra, certains disent être plus de 1 million. Les dernières statistiques recensaient 300 000 habitants alors que le quartier en abritait 400 000 dans les années de l’apartheid (dont les dernières lois ont été abolies en juin 1991). Les squatters se tassent où ils peuvent, les immigrés arrivent en masse des autres pays d’Afrique, le quartier enfle jusqu’à parfois exploser, comme lors des émeutes contre les étrangers qui sont parties de là à l’automne 2008*.
(…) « Pourquoi, dit Abednigo, un ancien habitant d’Alexandra, le gouvernement nous laisse-t-il vivre ainsi ? Notre quartier pourrit sur pied alors qu’on a construit des stades grandioses dont n ne saura que faire. Les gens sont à cran. Il y a environ 70% de chômeurs à Alexandra et bientôt les grands chantiers s’arrêteront, les entreprises de sécurité qui embauchent à tour de bras auront moins besoin de main-d’œuvre. Que se passera-t-il cet automne ? »
(…) On passe à Sandton par une volée d’échangeurs surplombant un parc où se retrouvaient, pour la pause déjeuner, les jeunes fleurons (black diamonds) d’une bourgeoisie noire qui a émergé dans les années post apartheid où l’espoir et les investissements flambaient de pair. Plus personne n’ y va ; Les Noirs fortunés vivent à l’abri, comme les autres. (…) Au début des années 1970, Sandton était encore une vaste plaine où l’aristocratie blanche s’était inventé un paradis de manoirs et de parcs verdoyants, de country clubs et de réserves d’oiseaux tropicaux. C’est aujourd’hui la capitale financière de l’Afrique du Sud, le siège de ses plus riches entreprises, d’une des plus vastes galeries commerciales de l’hémisphère Sud et des hôtels de luxe. On la traverse en voiture, d’un parking à l’autre. Paranoïa tous les feux rouges. La ville est bien gardée, surveillée, barricadée. Toutes les villas de Sandton sont des forteresses invisibles, cernées de hauts murs, de fils électriques, de caméras et de barbelés….
(…) La peur et la criminalité sont une affaire de tous les instants. (…) Devant les critiques de laxisme faites au gouvernement démocrate de l’ANC, Susan Shabangu, ministre de l’Intérieur, a fait monter la tension d’un cran en 2008 : elle a conseillé aux policiers de tirer à vue : « Vous devez abattre ces salauds s’ils vous menacent, vous ou la communauté. Vous n’avez pas à vous soucier des règles. J’en rends la responsabilité. »
(…) Khalo Matabane, jeune cinéaste noir talentueux vient de boucler le tournage d’un long métrage qui fait des allers-retours entre Sandton et Alexandra. Il l’a baptisé State of violence. L’histoire d’un homme d’affaires noir dont la femme est assassinée aux portes de sa villa dans les beaux quartiers (la plupart des victimes des meurtres en Afrique du Sud sont des Noirs). Le personnage parcourt les rues d’Alexandra à la recherche du meurtrier et se retrouve plongé dans la violence de son propre passé. « Le film sera sans doute mal reçu ici, dit le réalisateur, La fin est abrupte, très ouverte, et n’offre aucune perspective de réconciliation. Le débat sur la violence en Afrique du Sud est biaisé. On veut sans cesse la couper de ses racines politiques pour l’attribuer à une jeunesse qui aurait perdu la raison. Mais l’Afrique du Sud est un pays choquant, beaucoup vivent dans un état de pauvreté exténuant, et la brutalité fait partie de entre existence depuis des décennies. On a armé les jeunes pour combattre un Etat policier, et ceux qui commettent aujourd’hui des agressions ne sont pas coupés de la politique. Ils savent ce qu’ils font. Quand on marginalise une population à ce point, elle reviendra toujours vous hanter. »
(…) A chaque palier, des grappes de jeunes gens désoeuvrés nous demandent du travail ou de l’argent. Certains habitants d’Alexandra ont peur des Zoulous, solidement organisés qu’ils soupçonnent de mener des expéditions punitives contre les autres ethnies. « Le quartier était autrefois quadrillé par les organisations politiques, se souvient Abednigo, vétéran de la lutte contre l’apartheid. Il y avait des comités dans les cours, les pâtés de maisons, les rues…La résistance était féroce et armée, et nous avions un objectif commun. Aujourd’hui, l’ANC est au pouvoir et nous ne savons plus où est l’ennemi. Les associations ont perdu du terrain, la frustration grandit et les armes circulent encore sans que nous sachions comment et entre quelles mains. »

* En 2008, de violentes attaques ont visé les étrangers – Somaliens, Zimbabwéens, Congolais, Mozambicains…- qui sont venus s’installer dans les bidonvilles d’Afrique du Sud. Elles ont commencé à Alexandra le 11 mai et se sont étendues au reste du pays, faisant –officiellement – une vingtaine de morts dans les premiers jours et laissant des milliers de personnes sans abri.

Welcome to South Africa 2010 (21) : vuvuzela, briseuse d'oreilles


" Et si une simple trompette venait gâcher la fête? La vuvuzela, cette longue corne d’au moins 40 centimètres, est à nouveau mise en cause. C'est que, quand plusieurs milliers de supporters enthousiastes la font résonner en même temps, un bourdonnement monocorde envahit le stade. Comme si vous étiez pris dans un immense nuage de moustiques. Cet instrument du folklore local n'est donc pas du goût de tout le monde. Et ses opposants pourraient bien avoir trouvé un nouvel argument de poids : sa nocivité pour l'ouïe.

Une récente étude, menée par les docteurs De Wet Swanepoel, de l'université de Pretoria, et James Hall, de l'université de Floride, et publiée dans le South African Medical Journal, affirme qu'il y a un risque réel de perte auditive pour les spectateurs de la prochaine Coupe du monde. Les chercheurs ont testé l'ouïe de onze supporters avant et après un match de Premier Soccer League, le championnat de football sud-africain, dans un stade de 30 000 places où s'époumonaient de nombreux adeptes de la vuvuzela.
Les résultats sont édifiants : plus de 100 décibels en moyenne pendant près de deux heures, avec des pointes à plus de 140, alors qu'une exposition prolongée au-delà de 85 décibels est considérée comme dangereuse par l'Organisation mondiale de la santé. Ceux qui étaient le plus proche des vuvuzelas étaient les plus touchés. Après le match, les capacités auditives des onze participants avaient baissé de façon significative. « Si vous êtes confronté à de tels niveaux sonores continuellement pendant 10, 15 ou 20 minutes, vous vous exposez à un risque de perte auditive permanente », précise ainsi le docteur Swanepoel.

L'été dernier, déjà, pendant la Coupe des Confédérations en Afrique du Sud, sorte de répétition générale pour le pays, certains joueurs s'étaient plaints du bruit assourdissant des vuvuzelas. « On a l’habitude des chants, mais cette trompette gêne notre concentration », tonnait le milieu de terrain espagnol Xabi Alonso. Le sélectionneur des Pays-Bas et le président de la Fédération japonaise de football avaient même réclamé son interdiction. En vain. Ainsi, si le code de conduite dans les stades adopté par la Fifa pour la prochaine Coupe du monde prohibe « des instruments opérés mécaniquement qui produisent un volume sonore excessif tel que les mégaphones, sirènes ou cornes de brume », il n'interdit pas les vuvuzelas. Un fait d'autant plus surprenant que le volume sonore des cornes de brume oscille « seulement » entre 100 et 120 décibels.
Contactée, la Fifa ne souhaite pas faire de commentaire sur l'étude. On ne touche pas si facilement à la vuvuzela, objet de fierté nationale pour le pays organisateur. Lors de la Coupe des Confédérations, Sepp Blatter, le président de la Fifa, avait martelé : « La Coupe du monde sera sud-africaine jusqu’au bout. Il ne faut pas essayer de l’européaniser. » À quelques semaines du Mondial, il n’a pas l’intention de changer de position. » (Jean - Louis Dell' Oro, AFP)
Dédié à celui - sans doute porte-t-il des prothèses auditives - qui, à l’occasion de la Coupe des Confédérations, en juin 2009, avait affirmé que la vuvuzela est un symbole de l’exception culturelle sud –africaine et que « bannir les vuvuzelas, ce serait de la discrimination."